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Impact de la douleur sur le "soi"





Aujourd'hui nous parlons de cette étude :

👉 Dans cette étude, les auteurs ont utilisé des entretiens avec des patients ayant des lombalgies chroniques pour repérer des thèmes et sous thèmes communs et les interpréter pour y donner un sens.


👉 L’Analyse Interprétative Phénoménologique (IPA) est une méthode d’analyse qualitative du discours propice à la compréhension de l’expérience vécue et du sens que les individus donnent à leurs évènements de vie (Restivo 2018), elle est très utilisée en psychologie (Smith 2004).

L’IPA ne cherche pas forcément une grande représentativité (ici on a uniquement des personnes européennes, caucasiennes, de 36 et 52 ans) car les résultats sont surtout informatifs et peu généralisables.


💥 Les grands thèmes qui se dégagent sont :


👉 Un impact négatif sur l'image de soi.

Cet impact semble se traduire par la coexistence d’un ancien soi et d'un nouveau soi, porteur de valeurs moins idéales.

« Ça n'est pas vraiment moi, je deviens comme ça et je sais que je suis méchante là maintenant mais je ne peux pas l'empêcher. »

L’apparition du « soi douloureux » semble plus difficile à gérer que l’apparition de la douleur elle-même


👉 Cet impact est un continuum, ou une trajectoire, pas un évènement figé.

Dans les six entretiens, on voit différentes présentations de ce phénomène : l'un des participants décrit ce nouveau soi indésirable comme un étranger qui le suit partout, alors qu'un autre des participants semble avoir parfaitement adopté cette nouvelle image de lui-même.

il semble exister un développement chronologique : les patients commencent par un combat pour conserver le « soi » originel, puis commencent à douter de cette possibilité avant de se résigner enfin au nouveau « soi » moins souhaitable.


👉 Cet impact est plus violent dans la sphère publique.

En présence des autres, la nécessité de maintenir une apparence de soi compatible avec ce que les autres attendent ou dont ils auraient besoin, ou bien l'impossibilité de montrer ce soi renforce les sentiments négatifs, notamment l'inutilité sociale perçue. Y est également associé un sentiment de honte et de culpabilité (voir de détestation de soi) de ne pas pouvoir être ou paraître comme il le faudrait.

Le nouveau "soi douloureux" est socialement indésirable, honteux et s'immisce dans la conscience du patient de façon plus aiguë lorsque les interactions sociales sont présentes.


👉 Cela finit par altérer la relation à l'autre.

Les participants décrivent comment la douleur finit par leur faire apprécier de voir d'autres souffrir, voire de provoquer de la souffrance, afin de se sentir moins seul dans leur malheur. Ils expriment une difficulté à compatir avec les autres, tout en se dévalorisant fortement d'avoir ces pensées et émotions.

Les difficultés à gérer le soi n'étaient pas seulement liés à l'incapacité ou à la perte d'un rôle social, elles étaient également liées aux difficultés quotidiennes de gestion d'expériences ressenties comme étant menaçantes, intrusives et incontrôlables.


👉 Il y a une grande peur du jugement par les autres à cause de ce jugement sur soi.

Les patients ont du mal à se valoriser dans leur vie quotidienne et ont le sentiment que leurs expériences personnelles sont anormales et quelles les rendent vulnérables à un jugement hostile. Ils vivent dans la peur d'être jugés négativement par les autres, d'être détestés ou plaints. Une anticipation omniprésente de tels jugements dicte souvent leur comportement et les incitent soit à se retirer des contacts sociaux, soit à surcompenser en présence des autres et à en faire trop.

Le sentiment de honte parait central chez ces patients et il était parfois plus inconfortable et insupportable que leurs sensations de douleur ou d’immobilité.


👉 En conclusion, la douleur peut modifier profondément l'identité des personnes qui en souffrent. Elle peut les empêcher de se retrouver dans une identité acceptable socialement. Elle peut donner l'impression de "polluer" les autres, entraînant la peur d'être jugé et puni pour cela, ainsi que pour ce nouveau soi "maléfique".


L'expérience des participants à cette étude est très proche de celle décrite par Hellstrom (2001), qui a décrit la nostalgie d'un soi passé et une lutte présente à la fois avec un " soi piégé " (qui se sentait incapable de progresser ou de communiquer avec les gens) et un " soi projeté " (qui était vulnérable au jugement des autres).


👉 Quelles implications pourrait-on en tirer en pratique ?

Il semble insuffisant de s'intéresser uniquement au traitement de la douleur. Il faudrait aussi s'intéresser au traitement de son impact sur la personne souffrante.Il peut être utile de rassurer les personnes qui en souffrent à ce sujet. Aider les patients à identifier et reconnaître ces problèmes, dès leur commencement pourrait les aider à les accepter ou à les affronter.


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